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Xavier Collin : « On a été N°1 dans 17 pays, Top 10 des droits Sacem 2005… »

Xavier Collin est… Asset Manager. Rassurez-vous, Rock made in France n’est pas devenu le site préféré des traders. Quoi que… Simplement, si la musique était aux avant postes du changement de paradigme numérique à la fin des années 90, elle commence tout juste à trouver son business modèle et les hommes qui l’accompagnent. Aujourd’hui, les artistes ne cherchent plus forcément un label, mais un partenaire pour gérer les droits de leurs œuvres. Le métier historique d’un éditeur, non ? Présent dans le monde entier, mais bien installé à Lille, Xavier « Bill » Collin a pris le virage du digitale pour devenir cet éditeur 2.0 (Asset Manager) pour le bien de ses artistes. K-Maro ou Shy’m ne s’en plaignent pas. Rencontre.     

Qu’est-ce qu’un Asset Manager dans la musique ?
Xavier Collin : C’est une personne qui gère tous les droits d’un artiste et les meta données qui y sont associées. Ce métier existe depuis longtemps, mais cette gestion des données est aujourd’hui devenue le cœur de la profession : on en réceptionne et on en livre tout le temps. Le lien avec la finance, c’est que dans les deux cas, ça génère une économie.

Dans la musique, ça se traduit comment ?
Xavier Collin : Mon métier historique, c’est éditeur. J’ai toujours géré des droits. Aujourd’hui, un éditeur n’est pas surpris du traitement des données du streaming par exemple. Avec la Sacem, on fonctionne comme ça depuis longtemps : on a des lignes d’œuvres avec des centimes d’euros en face. C’est l’adition de toutes ces lignes qui produit des euros. C’est pareil dans le streaming. Ça a surpris les producteurs et les labels de découvrir ce mode de rémunération qu’ils ont pris au départ comme une baisse de valeur – ce qui est un peu vrai – tout en s’offusquant de ces micros centimes. Pour eux, c’était de la menue monnaie. Mais, il fallait juste la gérer et la faire croitre. Pour un éditeur, comme pour le compositeur et l’auteur, le numérique est une nouvelle opportunité financière dans l’exploitation des droits de l’œuvre. Notre travail a simplement évolué avec un accès plus direct au public.

L’Asset Manageur serait alors un éditeur 2.0…
Xavier Collin : Nos outils sont naturellement adaptés à la diffusion numérique et des nouveaux droits liés au master. En même temps, dans d’autres domaines comme l’audio visuel, on est amené à négocier à la fois la partie publishing et la partie master. Ça fait 35 ans que je fais ça !

Comment avez vous débuté votre carrière ?
Xavier Collin : La société que je gère a été créée en 1991 par des anglais. Le côté anglo saxon a fait qu’ils ont monté une société, alors qu’un français un peu structuré aurait monté une association. La boîte s’appelait WTPL (Woof Trade Publishing LTD)… Un jeu de mot à la con (rire). Moi, je suis arrivé en 1993. Je les connaissais pour les avoir fait jouer à Lille et avoir réalisé leur clip. C’est comme ça que je suis devenu tourneur, manager, puis producteur et enfin éditeur de leur projet et de leur groupe The Barking Dogs. Ça a été très dur, mais très formateur. Le musicien qui ne venait pas à 3 répétitions de suite était viré du groupe. Ils étaient pro. J’ai simplement structuré tout ça.

En revanche, on s’est associé avec une boîte belge pour la production de spectacle. C’est carrément un autre métier. J’avais remarqué qu’avec un seul groupe, au bout de 3 appels négatifs, c’était mort. Avec un catalogue, tu peux rappeler. Les belges, nous ont envoyés dEUS (qui venait de signer chez Island en Angleterre) et PPz30, moins connu, mais auréolé du prix Découverte du Printemps de Bourges Belge en 1994. Ça m’a permis de me professionnaliser. Les belges se font pas chier avec des tremplins !  Ils mettent les moyens et 6 mois avant, on bosse la tournée. Je leur ai trouvé 60 dates en France. A côté de ça, avec les Barking Dogs ont faisait 150 dates par an en vitesse de croisière. De mon côté, j’avais des groupes de Lille comme Marcel et son Orchestre. J’ai terminé, on faisait 800 concerts à l’année !

Du coup, qu’est-ce qui a changé en 20 ans ?
Xavier Collin : Les moyens de communication ! Mon premier téléphone portable a changé ma vie ! Quand j’ai monté ma boîte, mon premier achat, ça a été un Fax ! C’est toujours une course à l’armement quelque part. Moi, j’ai commencé avec un classeur et maintenant on gère tout ça sur un ordinateur. L’Asset Management part de là, on s’organise, on apprend à optimiser son temps et donc ses revenus.

Des revenus qui ont aussi beaucoup évolués. Le live, la synchro, les ventes physiques et maintenant le numérique…
Xavier Collin : Oui les droits numérique sont devenus un vrai complément de revenu pour l’artiste. Ensuite, ça dépend des types d’artistes et de leur esthétique musicale. Mais, c’est la répartition de ces revenus qui a longtemps posé problème. Si l’assiette est la même (99 centimes par morceau), le pourcentage reversé variait. Ainsi, on avait tendance à pousser i-Tunes, car il n’y avait pas de TVA ! On gagnait 55 centimes à la Fnac et 71 centimes sur i-Tunes.

Même pour le Streaming ?
Xavier Collin : Bien sûr ! Certains artistes pensent que la Sacem est une œuvre sociale et que chaque trimestre, ils vont toucher un chèque. Masi si leur musique n’est pas jouée, pas utilisée, pas exploitée, il ne se passe rien ! La moitié des sociétaires ne touchent rien. C’est la même chose pour le Streaming. Si on met sa musique sur Internet et qu’on attend qu’il se passe quelque chose, on va attendre longtemps ! C’est comme tout le reste : il faut rendre le projet visible à grand renfort de communication et de marketing.

Peut-on comparer le revenu d’un stream et la vente d’un 45t de l’époque ?
Xavier Collin : Compte tenu des abattements et des accords de l’époque, je pense que c’est équivalent. La différence aujourd’hui, c’est qu’on fait cohabiter différents supports. Je travaille encore avec beaucoup d’artistes de scène : leur meilleure boutique, c’est l’after show. Aujourd’hui, on peut compiler le vinyle, le CD, le download, etc. A la fin, l’artiste gagne plus aujourd’hui que dans les années 80.

Du coup, l’intermittence du spectacle est moins nécessaire ?
Xavier Collin : Non, non ! On a la chance d’être en France, il faut profiter de ce que le pays nous offre. Mon associé allemand pleure à chaque fois que je lui explique toutes les aides qui existent entre le crédit d’impôt, les aides à la prod, de tournée, de clip, d’albums, etc.

Ça occupe un Asset Manager à plein temps toutes ces aides ?
Xavier Collin : Il ne faut pas tomber dans ce piège là. Il faut avoir un regard sur l’économie de ce marché, ce qu’il génère en termes de public pour croitre et se transformer. Maintenant, si on a la chance d’avoir des leviers financiers, ça fait parti du jeu.

La relation artiste, label, éditeur a changé ?
Xavier Collin : Les labels ont longtemps gardé une place prépondérante dans la tête de l’artiste. Y’a dix ans, quand un éditeur proposait à un artiste de l’accompagner dans ses projets (écriture, recherche de partenaires, etc), l’artiste voyait le risque de ne plus pouvoir signer avec le label puisque ces derniers négocient automatiquement les éditions. Leur priorité était de sortir un album. Depuis deux ou trois ans, les artistes cherchent d’abord un éditeur. Ils se foutent d’avoir un label parce qu’il existe de nombreuses solutions pour commercialiser sa musique. La Fnac aujourd’hui, c’est du dépôt. Donc, l’objectif, c’est de trouver un distributeur pour éventuellement livrer les magasins. Si ça ne marche pas, temps pis, on vendra à la fin des concerts ou par correspondance ! A ça, on ajoute le digital avec un partenaire ou directement par les solutions de l’éditeur. Moi par exemple, j’ai une distrib’ PIAS. A l’époque, mes artistes étaient contents, c’était une belle marque. Ils pouvaient dire qu’ils avaient signé chez PIAS !  Moi, je n’ai pas d’égo. L’important, c’est que ça renforce la confiance de l’artiste, mais aussi d’un programmateur de concert ou d’un journaliste.

Quelle est votre principale source de revenus ?
Xavier Collin : L’audiovisuel avec les séries et le cinéma ! Quand vous placez un titre dans une série américaine, ça joue dans tellement de pays que c’est rapidement énorme et récurrent.
En édition, on peut différencier deux types de droit : les DRM, les Droits de Reproduction Mécanique (le disque entre autre) et les DEP, Droits d’Exécution Public (concert et diffusion radio, télé, etc.)  C’est dans ce second poste que l’éditeur français gagne le moins. Dans d’autres pays, c’est toujours 50/50. En France, l’éditeur n’aura qu’un tiers des droits d’exécution public.
Quand, j’ai construit mon catalogue d’édition en 2003, je suis reparti de zéro. Je me suis donné 5 ans pour avoir un panel esthétique très large pour intéresser des gens dans l’audiovisuel pour qu’ils prennent mes musiques. J’ai eu un premier succès en 2004 avec K-Maro. On a été N°1 dans 17 pays, Top 10 des droits Sacem 2005 ! Moi, j’ai commencé à toucher la Sacem en août 2005 ! Pendant un an et demi, plein de copains voulaient que je les invite au resto, mais je n’avais pas d’argent ! Ce succès m’a permis d’être libre, c’est-à-dire ne pas signer la terre entière.

Votre priorité, c’est donc la synchro ?
Xavier Collin : Oui, mais tout dépend des projets. Certains artistes veulent d’abord sortir un album et tourner. Et en fonction de leur carrière, on va leur trouver des solutions. Quoi qu’il en soit, un pressage de disque c’est très ponctuel. On paye des droits mécaniques et puis on les touche à un instant T et puis c’est fini. Il n’y a pas de récurrence. Alors qu’une diffusion régulière, ça réamorce tout le processus. « Femme like you » de K-Maro a été n°1 il y a 15 ans et c’est encore 20% de mon chiffre d’affaires sur 2000 chansons ! Et encore, je ne suis que co-éditeur avec Warner Chapell. C’est pour dire la puissance de ces droits là ! On me demande toujours un extrait de ce titre pour un film ou une reprise. Julien Doré l’a reprise par exemple pour sa tournée. Pareil à l’étranger. Ceci dit, le métier historique demeure encore la vente de parole de chansons…

Les DEP, ce sont des droits parmi les plus compliqué et les plus locaux. Il faut absolument un représentant local, autrement les droits restent dans le pays. La Sacem est très forte pour ça. Elle a un process pour récupérer ces droits. Mais si vous n’avez pas déposez l’extrait du film, avec le découpage minuté précisément (on est payé à la seconde !), vous ne serez jamais payé. Rien n’est automatique. En France comme en Europe, on est dans le déclaratif. A l’inverse des Etats Unis où ils sont dans le scan. Là-bas, si on n’a pas déposé le morceau dans la base de données, ça ne match pas. Du coup, j’ai créé des structures et des partenariats à l’étranger pour collecter ma part dans ces pays. Dans ce cas, je n’ai pas ma part Sacem de revenu sur ces droits, je les touche directement et… Je gagne 1 an en trésorerie !

Quels conseils donneriez-vous à un jeune groupe pour bien démarrer ?
Xavier Collin : De bien s’entourer. Après peu importe le professionnel qui l’aide, mais il faut quelqu’un qui ait un pied dans le marché et des connections avec les acteurs de la filière musicale. Dans ma région à Lille, je suis actuellement sollicité par énormément de salles de concert pour créer des pépinières d’artistes. On fait des résidences, on prépare la scénographie, la lumière… C’est bien, mais personne ne pense au travaille en amont : l’écriture. On ne peut pas partir sur la route si on n’a pas les chansons !

On a plus de chance de réussir si on habite Paris ?
Xavier Collin : Non, au contraire On a plus de chance si on habite en Province ! Les artistes sont payés : il y a des aides, des locaux de répétition, des festivals… Lorsqu’ils donnent un concert, ils sont payés !
Quand j’ai démarré en 1993, on m’a dit qu’il fallait monter sur Paris. Mais entre temps, on a créé des salles de concert partout en France qui existaient bien avant les Smac. Tout ça est parti de toutes ces associations qui montaient des concerts dans les salles des fêtes. Et les groupes gagnaient leur vie. Le seul problème, c’était les axes de communication. Les routes n’étaient pas aussi bonnes et on mettait des heures entre chaque salle. Et je ne parle pas du train !
Même si tous les centres de décisions français sont concentrés à Paris, on a tout intérêt à s’installer en Province. Un artiste est mobile. Lille est à une heure en TGV de Paris, Rennes est à 1h25, Bordeaux à 2h… Les allers retours ne sont plus un problème. Et Paris devient une destination aussi fréquente que Los Angeles, Berlin ou Londres.

Propos recueillis par Hervé Devallan

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