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Attention talents !
Depuis 10 ans, l’opération Détours Adami n’en finit pas d’aider les jeunes artistes. Cette année, Nathalie Natiembé, St Lô, Odezenne, Van Pariahs, Saint Michel et Salut C’est Cool vont pouvoir se produire dans 14 festivals en France et à l’étranger. Des Vieilles Charrues aux Francofolies de Montréal en passant par Artrock, Le Printemps de Bourges ou Montreux Jazz Festival, ce sont quelques-uns des plus grands rendez-vous du rock qui vont permettre à ces artistes de se produire devant des milliers d’amateurs et autant de futurs fans ! Petit point sur ces 6 lauréats qui marient talents, originalité et création, chacun dans son univers : cold wave, pop électro, hip hop, world, etc.
Van Pariahs
Les titres de Von Pariahs sont à la fois beaux et concis. Ils donnent le maximum en un temps restreint. Le groupe propose des compositions sèches et tendues comme à la grande époque batcave, entre Joy Division et Bauhaus (Carolina ; Uptight ; Nerves) et donc bien dans l’esprit du temps. Ici, c’est la basse décharnée, la rythmique incisive et les toms qui donnent le ton.
Mais leur identité de futurs grands, les musiciens de Von Pariahs la trouve parce qu’ils enchevêtrent ces compositions à d’autres plus épiques et arrangées, construites à partir de beats dansants, de coeurs conquérants et de mélodies synthétiques. Le groupe génère alors les embryons d’un stadium rock inspiré, avec les titres Gruesome, At The Fairground ou encore l’hymne downtempo Under The Guns.
Les six musiciens de Von Pariahs sont précis et inspirés, minimalistes et réglés comme du papier à musique. Pour chaque concert, pour chaque séance de studio ils rejouent le combat entre punk et new-wave. Car leur cold-wave est teintée du haut lieu dont ils sont originaires (à côté de Nantes) et ses racines garage rock, dont témoigne directement le titre Debauchery.
C’est ainsi lorsque toutes ces forces antagonistes convergent que les Pariahs trouvent leur quintessence. La qualité tutoie alors les productions 1982 du label Factory, à peu prêt ce qui s’est fait de meilleur en pop moderne, de A Certain Ratio à Section 25 en passant par The Wake. On peut écouter à cet égard les incroyables Skywalking, Someone New ou encore Trippin’. Réellement dansant, réellement Trippant.
St. Lô
Blues-rock futuriste, électro rageuse, hip hop habité, St.Lô redonne ses lettres de noblesse à la fusion des éléments, avec une audace et une élégance certaine. Du groove tendu s’élèvent l’entrelacs des mélodies et la voix de la chanteuse Mezz. Walidah, fulgurante, profonde, détentrice de quatre décennies de soul. Entre Bretagne et Brooklyn, la chanteuse et ses complices dessinent les contours d’un univers sonore urbain, hypnotique et inspiré. L’alchimie est un mystère, St.Lô en connait le secret.
Salut C’est Cool
N’est stupide que la stupidité. Toi le gamin, toi le jeune, toi le vieux qui aime te coucher tard et manger de la bonne purée, viens danser à la grande kermesse de l’électronique. A la lisière de la blague dadaïste et de la performance vitale pour notre kiffage de vibes, les Salut c’est cool affirment le contre-pouvoir de Paint 3.5, Windows 98, la saucisse entre amis, des compilations Thunderdome (tu sais celle avec le cobra), et l’Internet utilisé avec la puissance cérébrale d’un minitel. Le No-look avait engendré dans les années 90 des groupes avec jean déchiré et nihilisme suicidaire, les années 2010 seront le fruit de la révolution technoïde, des moustaches de friperie et du positivisme (positiver tout ce qui est positif, transformer le négatif en jus de fruits multi-vitaminés). Insensés, ils prennent des risques de malades fous avec des figures acrobatiques tel que le crabe. Tout cela pour votre seul bonheur et garanti sans dérision. C’est beau comme un arc en ciel mais plus sûr : contrairement à leurs promesses fugaces, les couleurs de Salut c’est cool ne disparaîtront jamais de ton cœur.
Saint Michel
Tout les séparait. Sauf la musique. Ce qui constitue un excellent début. Surtout lorsqu’on finit par s’appeler St Michel et qu’on vient plutôt de Versailles – L’autre capitale de la musique contemporaine française. Leurs aînés les ont d’ailleurs adoubés sans l’ombre d’une hésitation dès l’écoute de leurs premières maquettes. Philippe vient d’un milieu « bourgeois-catho », comme il le dit lui même, qui l’obligea même à en découdre avec les « scouts d’un jour » ; quand Émile, lui, est issu d’un pur lignage théâtral qui, entre autres, le conduisit à suivre sa famille sur l’élaboration de pièces aux quatre coins du monde. Ils ont néanmoins tous les deux commencer à jouer d’un instrument très jeune. Philippe était solitaire, et cherchait à fuir son milieu d’origine. Mais il vénérait Radiohead. Emile était plutôt en phase avec sa famille. Il avait un grand frère qui lui permit pourtant de s’en extraire en lui faisant découvrir le jazz et les Beatles. Et tous deux parvinrent donc à leur fin grâce à la musique. Il y eut d’abord un premier groupe : Milestone. Dont on se souvient peu alors qu’il fit sensation en son temps. Mais qui, malgré de belles lignes vaporeuses de guitares contenues et des compo « à la silver mount zion », ne dépassa jamais l’axe Paris-Versailles. Ce groupe permit néanmoins à Emile, qui en était fan, de rencontrer Philippe qui en était le leader, mais en avait marre d’une errance musicale, disons, non conclusive… L’étincelle de leur rencontre, dans un passé encore proche, leur permet de remédier au problème. Ils s’entendent si bien, aiment tellement la musique et leurs pas ainsi que leurs affinités électives s’emboîtent si bien qu’ils décident logiquement de ne pas en rester là. Et se lancent dans l’aventure St Michel !
Rêves, corps, drogues, heures creuses, villes – est-ce qu’il existe un autre mot pour dire souvenirs ? Trains de nuit, rage, réel, fautes de réel, faute de rage, animal. Tout passe par les veines, est digéré par le son et reparait dans le verbe, en boomerang. Il y a un mélange d’obstination et de relâchement dans ce qu’ils essaient. Il y a quelque chose qui résiste au fond de la gorge. Odezenne cherche un endroit où communier, un battement. C’est un ensemble de tentatives vaudou qui nargue le cadre et invente du présent. Convoque l’image inconsciente, racle la rétine. Défonce la porte à doux coups et glisse du nouveau partout où il reste de la place pour penser l’intime et sonder le collectif. Ce qui apparaît sombre en sous sol est baigné de lumière en surface. C’est du cinéma whisky-flemme, nuit blanche, cauchemars en flash, cœur divisé. Les bras sont derrière la tête, les cartes abattues sur la table, le sourire en coin. Les rimes sont enfilées en hâte pour dire l’existence. Dans son essence floue.
Sans gras. Sans dieu. Sans mots doubles. Odezenne renifle en riant après avoir pleuré à cinq et s’en va danser sur les tombes. C’est la confirmation qu’il n’est pas question de savoir quel genre musical, quel territoire disciplinaire on a sous les yeux ou dans les oreilles. Il est question maintenant de savoir quels individus sont en mesure de s’exprimer. Alors va te faire foutre toi et ton rap.
Elle dit toujours qu’elle fait du maloya. Et elle a bien raison, Nathalie Natiembé. Parce que s’il est quasi-absent, rythmiquement, de son nouvel album, il enveloppe l’ensemble de son état d’esprit de « maronaz ». Oui, elle est libre, Nathalie Natiembé. Et rebelle. Une énergie qui lui vaut le surnom de « punkette du maloya ». Avec Bonbon zétwal, c’est une énergie ciselée, canalisée, passée au tamis de l’intime, qu’elle nous livre. Ça sent l’album de l’aboutissement, ça. Comme si ses années de flirt un peu vache avec le rock, la pop, le punk, le reggae, goûtaient enfin le plaisir apaisé du mariage heureux avec cette culture réunionnaise – seconde peau. Celle qui habite sa transe des mots.