Rock Made in France

Nanogramme, Agence web paris nice, application web et mobile

Actu

Christophe Ernault : « La presse musicale spécialisée écoute les disques de variété française avec la grille du rock. C’est stupide. »

Christophe-Ernault

Qui est vraiment Christophe Ernault ? Alister, le chanteur ? Un novelliste ? Un homme de presse, de télé, de radio ? Tout cela à fois et un peu plus encore, tant il multiplie les projets. Derniers en date : un troisième album fin prêt, un livre sur les bizarreries dans les textes des chansons françaises, sans oublier la revue Schnock dont le douzième numéro est consacré à Pierre Desproges. Rencontre avec un homme bien dans son époque, du MP3 aux années 70.

Christian Eudeline : Artiste, avec deux albums déjà sortis et bientôt un troisième, un recueil de nouvelles Playlist, sans oublier l’aventure Schnock, n’as-tu pas parfois l’impression de te disperser ?
Christophe Ernault : Vu comme ça… Mais le premier truc qui est sorti, c’est le recueil de nouvelles, en 2005. Avant ça, j’étais scénariste pour la télé. Et je faisais déjà de la musique, sans avoir l’intention d’en vivre. Puis tout c’est accéléré avec l’album d’Adrienne Pauly que j’ai co-écrit. C’est ça qui m’a donné envie de refaire des trucs pour moi.

alister pochette album– Pourquoi « re » ?
Christophe Ernault : Il y a une période quand j’étais jeune, j’avais 20 ans, je me trimbalais avec mes K7 dans les maisons de disques et ça ne marchait pas, j’étais Christophe Ernault. C’était déjà pop mais plus propre que ce qui est sorti par la suite. Adrienne m’a remis en selle musicalement, et comme c’est allé assez vite, je n’ai pas trop eu le temps de réfléchir : les deux albums « Alister » sont sortis en trois ans. Le premier disque « Aucun Mal Ne Vous Sera fait » s’est vendu à 15.000 exemplaires ; j’en ai fait un deuxième qui a beaucoup moins marché, et parallèlement, pendant la promo du deuxième « Double Détente », je me disais que quelque chose clochait dans ce milieu. Je voyais qu’il y avait de moins en moins d’argent, que les tourneurs ne suivaient plus. En 2010-2011, il y a eu un frein. En l’espace de trois ans j’ai vu l’argent se mettre à manquer.


– Concrètement ?
Christophe Ernault : Pour la tournée de mon premier album, j’ai dû faire 60 dates et mon tourneur, Radical, travaillait avec mon label Barclay. C’est beaucoup soixante dates, et autour de moi tous mes camarades rencontraient le même genre de conditions. On jouait dans des salles et il n’y avait pas réellement de demandes, on s’interrogeait vraiment sur les raisons de telles tournées.

christophe Ernault 3– A Paris tu joues où ?
Christophe Ernault: J’ai fait une Cigale en octobre 2008, après le Point FMR et le Café de la Danse deux ou trois fois. Deux ans après je reviens avec un nouvel album, et je rencontre des conditions différentes, Barclay ne veut pas insuffler d’argent, et donc le tourneur est frileux. Je ferai quatre ou cinq dates en tout.

– Et donc Schnock ?
Christophe Ernault : C’était inconscient, avec Laurence Rémila de Technikart, on voulait faire une revue presque en loucedé. Moi j’avais un peu de temps, moins de répètes, j’avais envie de me marrer, parce que c’était un peu lourd quand même quand tu as un disque auquel tu viens de consacrer six mois de ta vie et qu’il ne se passe rien. Le premier numéro de Schnock est sorti en mai 2011, et « Double Détente » est sorti au mois de mars 2011. L’un marche, l’autre pas. C’est tout simple.

schnock-n12– C’est quoi l’idée de Schnock ?
Christophe Ernault : On se disait qu’on aimait bien tous les deux les vieux trucs, qu’il y avait une sorte d’impuissance face à la proposition culturelle de notre époque. Que tout ce qui sortait nous faisait chier, dans tous les domaines. Laurence travaillait à Technikart, il sortait d’interviews et était super frustré parce qu’il avait à écrire. J’avais la même sensation en tant qu’artiste. Le mélange des deux a fait qu’on s’est dit : « Il y avait quelque chose à faire ». Ça c’est nous deux à la terrasse d’un café, après on cherche un éditeur. On envoie le projet à plusieurs maisons d’éditions, mais ils veulent tout changer, sauf La Tango qui nous dit banco ! Entre-temps on a besoin d’un Directeur Artistique qu’on ne peut pas trop payer donc pas trop guider, il nous propose une maquette très girlie, très colorée, très pop, qui n’est pas du tout ce qu’on avait en tête, mais qui sera l‘une des clés du succès. On demande à Erwan de s’occuper de la couve, il nous dessine un super Jean-Pierre Marielle ! Le premier tirage est de 2.000 exemplaires, ça part tout de suite. Un mois après, un retirage est prévu. Ca reste une de nos meilleures ventes avec 12.000 copies. A la rentrée, Flammarion notre distributeur nous demande quand arrive le prochain, on avait prévu un semestriel et là on passe en trimestriel. Je vois que mon album est mort alors je dis OK !

– Et pourquoi cette ligne éditoriale autour des années 70 ?
Christophe Ernault: C’est davantage mon époque que les sixties qui restent celle de mes parents. Je suis né en 1974. Quand je pensais à Schnock c’était l’esthétique Giscardo-Mitterandienne, Marielle et Jean Yanne qui me venait immédiatement.


– Dans chaque numéro tu nous évoques un album étonnant. Aucun regret sur ces choix ?
Christophe Ernault : Dans le dernier numéro, c’est « Breakfast in America » de Supertramp qu’on m’a offert à 5 ans. Mais j’ai frôlé la ligne jaune quand j’ai essayé de défendre Carlos, et il y a quelque chose dans Schnock qui est parfois difficile à expliquer aux gens qui veulent travailler avec nous : on n’est ni Bide et Musique ni nanarland, deux super sites par ailleurs. On n’est pas là pour défendre l’indéfendable ou le mauvais goût, ni pour se gausser de la médiocrité. Quand je défends Carlos j’essaye de trouver des arguments techniques, je parle de la rythmique qui est bonne, de la prise de son, etc.

– Venant d’un ponte de la variété, il ne pouvait en être autrement !
Christophe Ernault: Oui j’avoue ma mauvaise foi, mais je ne le referai pas. J’ai défendu un album de Sylvie Vartan « Qu’Est-Ce Qui Fait Pleurer Les Blondes ». Pour moi, c’est un très bon disque, sincèrement, un très bon disque de variété française. J’ai toujours considéré que la presse musicale spécialisée écoutait les disques de variété française avec la grille du rock. C’est stupide.  Il y a un malentendu profond, je viens du rock, et quand j’écoute Sylvie Vartan j’oublie mes références à Lou Reed et à Iggy Pop.


Jouissons Sans Entraves cover disque– D’où la compilation parue au printemps dernier « Jouissons Sans Entraves » ?
Christophe Ernault : Non, c’est le label qui est venu nous démarcher, ça s’est fait très vite. L’image de Schnock est déclinable en radio, en télé, c’est long et compliqué, mais c’est une idée que je garde derrière la tête, je viens de la télé.

– Aucune couv’ d’hommes ou de femmes politiques dans Schnock ? Une volonté ?
Christophe Ernault : C’est là aussi un projet, j’adorerais interviewer Dominique de Villepin ou Giscard d’Estaing sur leurs goûts littéraires, sortir du cadre, j’espère que ça se fera. Mais sans les discréditer. On a déjà fait un papier sur les jeunes Giscardiens et dans le dernier numéro on fait un portrait de René Dumont, le premier écolo.

– L’étonnant et très drôle article sur les fautes de français dans la chanson française aura une suite ?
Christophe Ernault : Oui. Un livre est en préparation sur le sujet. En dehors des bourdes et des gaffes, j’ai rassemblé plein de curiosité et de bizarrerie dans les textes. Ça sort en novembre.

– Es-tu collectionneur ?
Christophe Ernault: Non, absolument pas. Le MP3 me va bien, je suis archiviste, mais pas un mordu de vinyles.

– Tu nous files quand même un Top 10 de tes découvertes récentes ?
Christophe Ernault :
1- Phil Manzanera « Law And Order » (album Listen Now, 1976)


2- William Onyeabor « Fantastic Man » (album Who Is William Onyeabor, 1979)


3- Ian Matthews « Man In The Station » (album Stealin’ Home, 1978)


4- Vampire « Bad attitude »

5- Foxygen « How Can You really » (album Foxygen… And Star Power, 2014)


6- The Fat White Family « Touch The Leather » (2014)


7- Baxter Dury « Lips » (album It’s A Pleasure, 2014)

A écouter sur Deezer

8- Balduin « Father »  (2014)

9- Patrick Juvet « Les Voix de Harlem » (album Chrysalide, 1974)


10- Catherine Franck  » Plus la même » (1964)


Propos receuillis par Christian Eudeline et Hervé Devallan

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Abonnez-vous à notre newsletter

Retrouvez nous sur Facebook

    Les bonnes infos





    Les bonnes adresses