« Cinq ans de métro » par Fred Alpi

Le titre jette sa sentence : ces cinq années sous les pavés de la plage parisienne sont comparées à de la prison. Faux ! L’auteur n’en a pas pris pour 5 ans ! C’est volontairement que le chanteur guitariste des Angry Cats plonge dans l’underground parisien. Vingt ans plus tard, il (se) raconte

Tout démarre en 1990 quand Fred Alpi claque la porte de l’agence de communication qui l’employait. Il a tenu 1 an et manifestement, il n’est pas fait pour avoir un patron. Il faut dire que ses années berlinoises, juste avant la chute du mur, lui ont donné le goût de l’aventure et de l’indépendance. En retrouvant Paris, il laisse derrière lui son poste de bassiste dans le groupe punk Sprung aus den Wolken. Le grand écart entre un bureau haussmannien et un squat berlinois s’avère trop violent pour ce franco suédois. Qu’importe, il retrouve sa guitare classique et apprend quelques morceaux « made in France » pour affronter son premier wagon tagé RATP. Au menu : les années 50 et 60 avec les deux Jacques : Dutronc et Brel. Ça plait aux touristes et nourrit bien son homme.

Au fil des pages, Fred Alpi nous immerge dans ce monde en transhumance… où des arrêts sur image donnent naissance à de beaux portraits. Des collègues de rame aux SDF sédentaires(on pense à Michel…), en passant par d’authentiques escrocs, des femmes un peu engageantes ou simplement opportunistes, le monde souterrain met en lumière son lot d’humanité. Sans parler des matons de service en charge du respect de l’ordre et de la loi… qui date du préfet Papon ! ça tombe bien, ces supplétifs de l’état régalien ont le crane rasé. C’est ainsi qu’au fil de pages, l’anarchiste livre quelques pensées sur l’état du monde. On le préfère dans l’exercice du portrait.

« Cinq ans de métro » s’arrête après les grèves de décembre 1995. Cinq années ont passé et l’ambiance a changé. Désormais, Fred Alpi doit composer pour conquérir un autre public. Mais comme il l’écrit, ceci est une autre histoire. Une histoire qui se construit encore aujourd’hui avec The Angry Cats. Gageons que désormais, il ajoute une corde à sa guitare : celle de l’écrivain, car au fil des pages se dévoile un style alerte et entraînant. On suit l’auteur jusqu’au bout de sa plume, parfois jusqu’au bout de nos nuits. La vraie récompense d’un auteur !

Hervé Devallan
« Cinq ans de métro » par Fred Alpi aux éditions Libertalia, 230 pages, 10€
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