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John Trap : « Aujourd’hui je ne pourrais plus chanter en Anglais »
Avec son nouvel album John Trap nous fait son « Cinéma » (L’Eglise de la Petite Folie/Modulor) et, à travers douze morceaux rock, met en scène une palette d’émotions et de sentiments qui dessinent les contours d’un paysage intérieur. Entouré de quelques amis du Studio Fantôme, l’artiste signe un disque incandescent qui, à l’image de Brûle, le titre d’ouverture, renferme de nombreuses compositions entêtantes.
Pouvez-vous nous présenter en quelques mots ce nouvel album ?
John Trap : Il s’appelle « Cinéma ». C’est le sixième que j’enregistre depuis que je sors des disques en solo. C’est un album sur la mémoire des émotions. Je voulais raconter des moments inspirés de choses vécues par moi mais aussi par d’autres. Les histoires sont parfois claires et parfois beaucoup moins, pour que l’auditeur puisse se les approprier et leur donner un sens qui n’appartiendra qu’à lui. Ça parle d’amour, de neige, de cinéma, de folie et de peur face aux extrêmes et à la haine grandissante.
Comment s’est déroulé l’enregistrement ?
John Trap : Pas à pas sur environ 2 ans. Suivant les moments d’inspiration. La création de la musique ne me pose aucun problème mais pour les textes et l’enregistrement de la voix c’est plus insaisissable. C’est par période, par moment. Il n’y a pas que les mots qui comptent il y a aussi la manière de les chanter, l’émotion qu’on cherche à y mettre.
Le fait d’écrire en Français s’est-il imposé comme une évidence ?
John Trap : Oui. J’ai commencé par chanter en Anglais, et le Français s’est imposé petit à petit au fil des disques. Tout s’est passé lentement et en douceur, grâce à ma rencontre avec Arnaud Le Gouëfflec qui m’a ouvert d’autres horizons. Je ne renie rien mais aujourd’hui je ne pourrais plus chanter en Anglais.
Pourquoi avoir intitulé ce disque « Cinéma » ?
John Trap : Ce n’est pas moi qui ai trouvé le titre, aussi bizarre que cela puisse paraître. C’est mon camarade Arnaud le Gouëfflec. C’était tellement évident que je suis passé à côté. Mon travail s’inspire beaucoup de mes souvenirs. Et on le sait, la mémoire met souvent en scène. Ce qui m’intéresse ce n’est pas de raconter exactement ce qu’il s’est passé, mais d’essayer de retrouver et de toucher les émotions que j’en ai gardées. Et au cinéma on peut aller chercher des résonances avec certaines émotions de sa propre vie.
Vos textes sont effectivement ponctués de nombreux clins d’œil au septième art et à certains films. Quel rôle joue le cinéma dans votre inspiration et quels sont les œuvres ou auteurs que vous chérissez particulièrement ?
John Trap : Très jeune mes parents m’ont emmené dans les salles obscures et je sentais que c’était important. C’est un endroit où on pouvait se distraire, mais aussi expérimenter des émotions et comprendre des choses. J’ai beaucoup avancé dans ma vie grâce au cinéma. Tous les cinémas m’intéressent, du plus grand public au plus confidentiel. Si je devais ne garder qu’un seul film ce serait The Elephant Man de David Lynch. C’est un long métrage classique dans sa narration, sa structure, dans le jeu des acteurs, et pourtant on y trouve aussi des scènes totalement expérimentales, étranges et poétiques. C’est ce que j’essaye de faire en musique. Je m’occupe également d’une petite salle associative de ciné avec d’autres bénévoles là où je vis. Autant dire que je baigne dedans.
L’album s’ouvre sur le morceau « Brûle », qui se révèle être un véritable tube indé. Pouvez-vous nous parler de ce titre ?
John Trap : On peut brûler d’amour, de désir, mais on peut aussi avoir envie de tout brûler. C’est très intéressant comme mot. Les fanatiques religieux brûlaient les sorcières, les fascistes brûlaient les livres… On peut même avoir envie de brûler ceux qui brûlent. Ce sont des choses qui résonnent encore aujourd’hui malheureusement. Mais il y a aussi Lady Chatterley qui brûle d’amour pour son amant. Et « brûle » est aussi un peu synonyme de « exprime tes émotions » !
On retrouve sur cet album quelque artistes avec qui vous collaborez régulièrement (Arnaud Le Gouëfflec, ooTi, Delgado Jones…). Peut-on parler de famille artistique et en quoi était-il important pour vous qu’ils prennent part à ce disque ?
John Trap : Je fais partie du collectif d’artistes Le Studio Fantôme, basé à Brest, ce sont des gens que j’aime énormément et c’est tout naturel que je collabore avec eux aussi sur mes disques. Quand j’ai besoin de voix féminines c’est la chanteuse ooTi qui s’en charge. Et je travaille aussi beaucoup avec Delgado Jones. C’est important de travailler avec des gens qui vous comprennent surtout quand vous aborder des choses que vous maîtrisez moins. Par exemple pour la pochette, l’illustrateur Laurent Richard a fait un travail incroyable, qui colle parfaitement avec l’univers musical, alors que les indications que je lui avais données étaient assez floues.
Propos recueillis par Erwan Bargain