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Michka Assayas : « Le zouk ! C’est ma limite… »

Chaque soir (ou presque !), il est écouté « religieusement » par 250 000 auditeurs sur France Inter qui ne manqueraient pour pas grand-chose au monde leur rendez-vous quotidien avec le rock, mais aussi la techno, le metal, le folk et tant d’autres musique sur France Inter. Son émission Very Good Trip, diffusée depuis le 8 novembre 2015, se prolonge aussi depuis fin 2022 par un livre éponyme sous-titré Une Histoire Intime de la Musique où il répond aux questions avisées de Maud Berthomier, auteure de plusieurs livres sur le rock et la critique rock.

Dans Very Good Trip (le livre), vous déclarez que vous avez – enfin ! – compris pourquoi la musique est depuis si longtemps au centre de votre vie… Et à la toute fin, il y a cette photo de Ian Curtis (Joy Division), alors qu’au tout début vous parlez surtout de votre mère. En résumé, Michka Assayas, c’est qui ? C’est quoi ?
Michka Assayas : Ian Curtis et ma mère, ça, c’est une bonne définition (rires) ! C’est la conjonction de l’acquis et de l’inné, entre ce que l’on a choisi et ce que l’on n’a pas choisi. Ce qui est intéressant avec ma mère, c’est qu’elle me faisait écouter de la musique. Je subissais en quelque sorte… J’étais dans une écoute passive. Je pense par exemple à la chanson The Girl From Ipanema, ou Cole Porter qu’elle adorait. Et puis, plus tard, il y a ce que j’ai choisi : Ian Curtis… A l’époque, je faisais un travail d’ordre littéraire de critique musical (notamment à Rock § Folk), à cheval sur différents trucs. Ce livre, Very Good Trip, avec Maud Berthomier, c’est comme une cartographie de ce qu’a été mon parcours musical, celui d’une personne lambda, et comment des expériences collectives s’inscrivent dans mon histoire. Je n’ai pas été correspondant de guerre sur le front du punk, du post-punk ou de la new wave. Tout le monde pourrait écrire une histoire, son histoire avec la musique… Avec Maud, on est parti plutôt sur quelque chose à la Annie Ernaux, par petites touches, par évocations…

Avec l’émission Very Good Trip sur France Inter, vous réunissez en moyenne 260 000 auditeurs chaque soir du lundi au vendredi, sans compter les écoutes en replay du podcast. Ça fait beaucoup de monde… Vous vous considérez comme quoi : un gourou bienveillant, une sorte de prêtre officiant pour un culte singulier ?
Je suis surtout une sorte d’Oncle Paul, ou plutôt Oncle Michka, qui raconte des histoires à la radio. Et je ne m’en lasse pas. Si j’avais l’impression d’avoir fait le tour de la question, je n’aurais pas de jus et j’aurai arrêté depuis longtemps. Ce qui est bien, c’est qu’à la radio, personne ne me répond, et ça m’arrange bien. Je suis en quelque sorte protégé. Quand j’étais plus jeune, il y a fort longtemps donc (sourire), je pouvais être très violent dans mes textes publiés par Rock & Folk, et j’ai pu énerver quelques mecs, genre rockabilly, qui voulaient s’en prendre physiquement à moi, m’humilier pour se venger de ce que j’avais pu écrire. Il y avait une violence symbolique qui s’exerçait, une sorte de terreur sourde dans la musique rock, une guérilla, et même une petite guerre entre factions du rock. C’est un peu passé….

Est-ce qu’il y a un genre musical, qui, quoique vous fassiez, vous fait saigner des oreilles ? En gros, avec le temps, vous êtes-vous adouci ou radicalisé dans vos engouements musicaux ?
Le zouk ! C’est ma limite. Peut-être, sans doute, parce que je ne connais pas bien cette musique. Il faudrait que j’aille creuser un peu de ce côté-là.

Si je vous demande le morceau qui vous résume, ou celui qui vous vient direct en tête en pensant épiphanie, c’est quoi ?
Good Vibrations des Beach Boys. J’ai 8 ans. Je le découvre avec un voisin. C’est plus qu’une épiphanie, un émerveillement… Ca devient obsessionnel. Je veux à tout prix en savoir plus sur ce morceau. Je veux tout savoir.

Vous souvenez-vous du premier titre diffusé dans l’émission Very Good Trip ? Et savez-vous déjà quel sera le dernier qui sera joué ?
J’essaie de me souvenir… C’est Good Vibrations. Ou Strawberry Fields Forever des Beatles. Pour l’ultime morceau que je diffuserais dans Very Good Trip… Je n’ai pas d’idée qui me vienne tout de suite… Ah, si ! Un morceau des Young Marble Giants.

Dans le livre, vous dîtes que « Traquer la vérité vous a toujours fait battre le cœur… » Quelle est la légende (désavoué) autour d’un morceau ou d’un groupe qui vous a le plus déçu ?
La question est astucieuse… Je pense de suite à l’histoire de Blue Monday de New Order et toute la légende qui s’est développé autour de sa création dite par hasard. Dans un texte, David Byrne des Talking Heads parle de l’inspiration et il écrit que tout le monde se fait une idée de ce qu’est l’inspiration et comment elle vous tombe dessus et vous permet d’être créatif. Il conclut qu’il n’y a pas plus faux comme idée, et que le processus de création, du moins pour lui, est très différent et qu’il dépend des contraintes de lieux, d’environnement, de temps, d’espace… Pour avoir essayé de faire de la musique (en montant un groupe avec son fils), je comprends très bien ce qu’il veut dire. Cela peut devenir très chiant. Je parle du processus. J’adore, par exemple, cette idée que New Order ait écrit Blue Monday pour n’avoir plus qu’à appuyer sur un bouton pour lancer un titre et se barrer direct de la scène pour éviter de faire des rappels.

Si je vous dis que vous avez introduit un nouveau vocabulaire dans le rock, ou plutôt la critique rock, avec des mots récurrents comme « Blafard », « Anémique », « Polyrythmie », comment vous réagissez ?
C’est vrai, c’est mon lexique. Cela vient de mes lectures, de ma formation (Michka est Normalien). Il y a un petit côté artificiel. Ca vient de Balzac, Proust… Mais ce sont bien mes mots, mon vocabulaire.

Y aura-t-il un jour une 3ème réactualisation du Dictionnaire du Rock que vous avez lancé et supervisé ?
Je ne peux pas vraiment répondre. Dans un monde idéal, ce serait oui… Mais j’avoue que j’en ai un peu marre. Il faudrait que je passe la main à quelqu’un. 

A quelqu’une ? Comme Maud Berthomier avec qui vous avez signé Very Good Trip ?
Maud ? Pourquoi pas ? Elle est passionnée et passionnante. C’est une bonne idée…

A quand l’équivalent de ce Dictionnaire du Rock consacré au rock français ?
Ce n’est pas moi qui pourrais le faire. J’ai toujours eu un problème avec le rock français. Et pourtant, je reconnais qu’il y a des monuments comme Léo Ferré, ou Brigitte Fontaine, deux géants qui n’ont pas d’équivalents dans le rock anglo-saxon. J’ai aussi une immense tendresse pour Etienne Daho, ou encore le duo Mathématiques Modernes, et puis il y a tout ce que l’électro française apporté, généré dans la musique mondiale. Je n’oublie pas le phénomène Louise Attaque… Plus consensuel. Mais je ne me vois pas y consacrer du temps comme j’ai pu le faire avec le Dictionnaire du Rock. Je n’ai pas eu d’épiphanie avec des artistes ou des groupes français comme j’ai pu en avoir avec Joy Division ou plus récemment Ezra Furman. Je suis, je reste très anglophile.

Laurent Garnier possède plus de 50 000 vinyles classés, rangés, étiquetés, mais il est DJ. Savez-vous combien vous en possédez ? Et, est-ce que l’objet, le vinyle, est important pour vous ?
Non. Une collection pour moi, ça ressemble à une salle de musée. Je n’ai jamais été collectionneur et l’arrivée du CD a tout bouleversé. Je dois avoir quelque chose comme 2 ou 3000 disques, mais je ne sais pas vraiment.

La sonde Voyager est parti aux confins de l’univers avec différents trucs embarqués, dont un disque en or gravé avec deux morceaux, l’un de Bach, l’autre étant le Johnny Be Good de Chuck Berry… Si vous aviez le contrôle de Voyager, vous y mettriez quoi ?
Good Vibrations des Beach Boys. Ou alors, Apache des Shadows. Un instrumental, simple, dépouillé… Ou mieux encore :

Propos recueillis par Frédérick Rapilly
« Very Good Trip, Une Histoire Intime de la Musique » de Michka Assayas chez GM Editions – 216 pages – 34 €

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