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Kemar : « Porte de la Chapelle, on a véritablement ressenti la pression »

Kemar G

No One is Innocent revient en force. Entre deux concerts au Stade France en première partie d’AC/DC et une Cigale le 30 novembre, le groupe sort « Propaganda », son sixième album studio. L’occasion de rencontrer le leader charismatique du gang parisien et de lui poser quelques questions sur ses impressions live et ses secrets de studio.

Comment s’est passé le concert au Stade de France en première partie d’AC/DC
Kemar Gulbenkian
 : On avait une envie débordante de jouer. Malgré l’événement, et le fait d’être jeté dans l’arène à 18h30, on a décidé d’interpréter 6 nouveaux titres du dernier album. Du coup, la fraîcheur était là. On est un groupe de challenge. On a été fidèle à nous même. L’important dans des événements comme ça, c’est de se provoquer. C’est ça qui m’intéresse et non pas de jouer sur des acquis. C’était facile de n’interpréter que « Nomenklatura », « Chile » et tous nos classiques. Bon évidemment « La peau » reste incontournable. Mais, le premier soir on a joué « Revolution.com » qu’on a sorti de la setlist le mardi soir.


Et AC/DC, correct avec les franchies ?
K. G. : On a été vraiment bien accueilli, ce qui nous a rassuré car on appréhendait un peu : tu ne sais pas à quel sauce tu vas être mangé ! Pendant les balances, les anglais et les américains qui étaient sur le plateau on été super cools avec nous. Le samedi ils nous ont laissé 45 minutes de balance, ce qui était carrément inespéré. Sur ce genre de prod, ils te jugent par rapport aux techniciens qui sont avec toi. Si tu arrives avec des baltringues, tu n’es pas pris au sérieux. Nous on avait la chance d’avoir des bons cadors aux retours, aux façades et aux lumières. Il y a eu du respect mutuel. Et comme l’important c’est de rester à sa place, tout s’est bien passé. En revanche, on n’a pas vu Angus, ni les autres membres du groupe. Après le concert, ils se sont échappés par l’autre bout du couloir. Et comme ils arrivent juste une heure avant le show… Angus enfile son bermuda et sa cravate et c’est parti !

NO ONE IS INNOCENT - WEB 3Et si vous deviez comparer avec Motorhead ?
K. G. : Le lieu déjà en lui-même. Ce qu’il représente. Voir ton logo de chaque côté du stade ; se rappeler le nombre de grands événements qui se sont déroulés ici. Et puis surtout, en milieu d’après midi, quand on était dans le bus au moment de rentrer Porte de la Chapelle, on a compris ce que les footeux pouvaient ressentir, ce qu’ils appellent la pression d’un match. Tu comprends alors tous les commentaires de ces mecs là qui ne sont pas palpables lorsque tu es devant ton poste de télé… En rentrant dans le tunnel, j’ai regardé mes gars et là et j’ai senti qu’il se passait quelque chose. On a ressenti véritablement la pression. Ça a été le seul vrai moment de tension. Après nos techniciens ont rencontré les locaux du stade qui nous ont mis en confiance comme le régisseur général, un mec adorable. Une heure après être arrivé, on préparait les balances, il était quatre heures de l’après midi : on n’y croyait pas. Pour nous, ils allaient nous obliger à balancer à 18h pour un concert à 18h30.


Et qui a trouvé ces deux dates ?
K. G. : Notre tourneur, Drouot Production. Il nous a toujours défendu.

Parlons de Propaganda, le nouvel l’album. Tout commence avec Emmanuel de Arriba…
K. G. : Oui, Emmanuel c’est un vieux pote de lycée avec qui je bosse depuis 10 ans, depuis « Revolution.com » exactement. Il est auteur pour la télé, mais surtout il connait le groupe depuis qu’il existe. Je travaille seul ou avec lui. Mais ce qui a surtout changé, c’est qu’on n’a pas travaillé cet album devant un ordinateur avec des boucles de batterie, de basse, etc. Bon, pour être franc, on a commencé comme ça… Et très vite une fois dans le local, ça n’allait pas du tout. On était parti dans une phase un peu clash. J’ai senti qu’il n’y avait pas suffisamment d’enthousiasme. Physiquement, on ne dégageait pas grand-chose. Du coup, on a lâché les ordis, on est parti chacun de son côté. Deux mois après, tout le monde avait des idées nouvelles, pleins de bons riffs, de bonnes inspirations rythmiques… Moi j’étais aux anges, parce que tout d’un coup, je bouillonnais. Mes potes savent que quand il se passe ce truc là, c’est que ça va être extrêmement interactif entre nous. Ce que je vais donner physiquement dans l’interprétation, ça va se reporter sur les autres. C’est pour ça que cet album est animal, instinctif… Oui, cet album est palpable. C’est-à-dire que dans un moment de tension, tu sens la guitare qui arrive. Pour moi c’est un détail qui exprime vraiment ce que l’album dégage.


Ensuite, c’est au tour de Fred Duquesne d’assurer !
K. G.
 : Oui, mais avant on est allé aux studios Ferber, parce qu’on cherchait une grande pièce pour enregistrer les batteries. Ensuite on a tous enregistré en même temps ; puis on a fait le tri. Ce qu’on n’avait pas gardé, on l’a retravaillé chez Fred Duquesne (guitariste de Bukowski, ndlr), notre réalisateur. Il a été très important sur cet album. C’est le vrai producteur de rock en France. Au départ, je l’ai choisi parce qu’il a travaillé avec le groupe du nouveau guitariste qui est avec nous : The Dukes. Bref, c’est un pote de la bande. Quand Shanka m’a fait écouter les deux premiers morceaux de The Dukes, j’étais sur le cul. J’ai appelé Fred pour un test, on a travaillé 5 jours chez lui et j’ai dit : OK faisons l’album ensemble. En plus, c’est un diplomate, toujours à l’écoute tout en ayant des convictions et surtout c’est un mec qui continue à avoir le doute. Le doute, c’est le meilleur ami, du musicien, du producteur, du réalisateur. C’est ce qui te permet de toucher le Graal à un moment donné. Et puis, il est impliqué et n’hésite pas à dire : « Il est pas mal ton refrain, mais il pourrait être meilleur ». « Dans l’interprétation ? », « Non dans le texte »… Et bien j’ai revu ma copie. Et il avait raison. Le mec te donne le doute. Masi on l’accepte parce qu’on a appris à se connaître. Tous les matins, on arrivait et pendant une heure on parlait de tout et de rien avant de jouer. Désormais, si j’ai des titres à enregistrer je sais avec qui le faire car il m’a poussé dans mes retranchements. Il m’a permis de donner le meilleur de moi-même. Comme un coach sportif.


No one is innocent propagandaL’album a été enregistré quand ?
K. G. : Une semaine en juillet 2014 puis entre fin janvier et avril 2015.

Et entre les deux, il y a eu les attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher de Vincennes. Et ce morceau « Charlie ».
K. G. : Oui, il y avait cette instru qu’on travaillait depuis un moment et dont on n’arrivait pas voir le bout. J’ai simplement dit au gars que j’allais essayer d’écrire un bon texte sur Charlie, et ça a tout débloqué. Ça a été le dernier morceau enregistré avec Fred Duquesne.

Aujourd’hui tu réécrirais la même chose ?
K. G. : Dans 10 ans j’écrirai le même texte. Mais il faut une dose d’exigence. On ne fonctionne pas dans l’immédiateté avec No One. Deux jours après les événements, on n’a pas dit aux radios et aux télés qu’on voulait dire quelque chose. Ce n’est pas dans nos réflexes. On aime bien faire murir et surtout être super fier de ce qu’on a fait. J’ai envoyé le titre en mai chez Charlie. Les réactions ont été vraiment positives. Les journalistes nous ont dit : « ça fait du bien un morceau avec de la rage ! ». C’était notre réponse face à tous ces morceaux mielleux.


Un combat de plus avec l’Arménie ?
K. G. : Non, car je n’ai pas envie d’être l’arménien de service. Je l’ai fait à un moment où je sentais qu’il fallait parler de cette cause. A mon niveau, j’ai fait le boulot. Maintenant je suis passé à autre chose. La première fois que je suis allé en Arménie, c’est avec mes potes des Ogres de Barback qui ont aussi des origines arméniennes. C’était en septembre dernier (2014, ndlr). Je ne voulais pas y aller comme touriste de base, mais avec des gens qui connaissent le pays pour m’emmener là où on voit et on entend des choses. Avec Mathilde et Fred, et deux autres potes, ont été accompagné d’un arménien qui connaissait son pays. Maintenant quand je vois la façon dont les médias évoquent la commémoration du centième anniversaire du génocide arménien, la façon dont la diaspora ne parle que de sa reconnaissance par la Turquie, j’ai envie de leur dire : C’est super, mais vous êtes allés en Arménie ? Vous avez vu la pauvreté ? L’aridité des terres ? Des villages sans lumière ? Les stigmates du tremblement de terre ?… Vous n’avez pas l’impression que c’est de ça dont il faut parler ? Plutôt que de défendre corps et âmes la reconnaissance du génocide par des Turques qui ne le reconnaitront jamais ? Car ça implique de rendre des terres, de l’argent, de changer la géopolitique de la région et des relations avec l’Amérique et les Russes. C’est la guerre que vous voulez ? La vraie cicatrice qui est encore ouverte là-bas, c’est la guerre contre l’Azerbaïdjan qui a fait 30 000 morts. Ma position n’est peut-être pas très consensuelle…

NO ONE IS INNOCENT - WEB 2Dernière question : pourquoi attendre tant de temps entre deux albums ?
K. G. : On n’est pas le style de groupe qui sort des albums une fois tous les deux ans. On en est incapable, tout simplement parce qu’on part sur la route pendant plus d’un an après chaque sortie. Je suis incapable d’écrire en tournée. Physiquement je suis flingué. Et mentalement, j’ai besoin d’être au top pour écrire. Du coup, à ce moment là je ne suis pas un moteur pour le groupe. On me fait écouter des trucs, je n’y suis pas insensible, mais je ne suis pas un bon client pour mettre des textes dessus à ce moment là.

Propos recueillis par Hervé Devallan

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