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Aïtone « Aïtone »
La pop d’Aïtone multiplie les belles expériences et les rencontres étonnantes. Parfois jusqu’à surprendre. Un peu trop ?
Les Corses reconnaîtront immédiatement leurs petits et ne manqueront pas de vous parler de la forêt et des cascades d’Aïtone. Pourtant, à l’écoute du groupe éponyme, les amateurs de musiques polyphoniques risquent d’être déçus. Car on est ici au pays de la pop anglaise, entre Radiohead et Archive, légèrement progressive, mais surtout teinté d’électronique et d’un peu de rock à la façon Kinks des années 70. Aïtone est donc corse uniquement par l’attachement de son créateur à cette terre fière que la République française gère comme une colonie, c’est-à-dire comme le reste de ses provinces : avec mépris. Côté musique et soin on remonte dans le temps, c’est avec son pote Charles qu’Antoine Cathala a créé son premier groupe, Lemon Incest, sur les plages de l’Ile de Beauté où habitent leurs parents. Depuis de l’eau a coulé des montagnes et leur collaboration avec Fred Chichin (Rita Mitsouko) n’est plus qu’un souvenir. Il n’empêche que c’est l’adition de tous ces souvenirs et de ces différentes expériences qui conduisent à ce très bel album d’Aïtone né en 2015. Dès le premier titre, on est prisonnier de leur univers emmené par des claviers aériens (quand ce n’est pas les ondes martinot d’Augustin Viard) et bien soutenu par une rythmique toujours discrète, mais volontaire. Et quand les guitares font surface, (« Boy… »), elles poussent l’univers du groupe vers des contrées très enflammées. Ce qui n’est pas le cas sur leur tentative d’union avec le flow du rappeur Rouda. Deux titres qui désorientent et se regardent – ici – en chien de faïence plus qu’ils ne fusionnent. Pour le reste, la voix chaude, grave et légèrement cassée d’Antoine Cathala trouve un écrin à la hauteur de son talent.
Hervé Devallan
Aïtone « Aïtone » – (Modulor) – 3/5