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Jean-Noël Scherrer : mélancolie, nostalgie et élégance
La petite entreprise Last Train poursuit son long et beau chemin. Fort d’un superbe second album, nous avons rencontré le chanteur, auteur et compositeur (et plus encore !) du groupe : Jean-Noël Scherrer. Le jeune homme respire le rock sous toutes ces facettes, même les plus business. Entre son festival lyonnais La Messe de Minuit et un aller-retour en Corée, il garde la tête sur les épaules et sait où il va. Impressionnant du haut de ses 24 ans.
Last Train, un groupe Alsacien ? Lyonnais ? Parisien ?
Jean-Noël Scherrer : Pas parisien, c’est certain ! On est originaire d’Alsace, où on a grandi et créé le groupe. Mais c’est vrai qu’à la fin de nos études, on avait envie de bouger et on s’est installé à Lyon.
Pour quelles raisons ?
J-N. L. Lorsqu’on a monté le label Cold Fame, il existait déjà de nombreux acteurs similaires à Strasbourg comme Deaf Rock Records qui était vraiment crédible. On voulait s’éloigner d’eux pour ne pas générer une malsaine concurrence. Et puis, on avait envi de se rapprocher du groupe lyonnais, Holy Two, dont on a produit les premiers albums. Naturellement, on s’est installé à Lyon et on est tous tombé amoureux de la ville. On y vit depuis 5 ans.
Pour Last Train, tout se passe donc à Lyon désormais.
J-N. L Oui, pour la partie Live et production des lives avec l’entité Cold Fame. La partie promo locale et Festival est également basée dans la Cité des Gones. Le label créé à l’origine a intégré une holding – Pegase – dont le siège est à Paris. Cette maison de disque chapeaute des sous labels dont Deaf Rock fait parti. Avec plusieurs jeunes entrepreneurs (phono, édition, management…) on a uni nos forces. Moi j’ai amené la production de concert et la diffusion. Et plutôt que de faire ça chacun de notre côté et atteindre rapidement un plafond de verre, on a essayé d’être intelligent, de mettre nos égos de côté. Du coup, on a immédiatement eu un catalogue assez conséquent et une logistique qui suit réellement les projets.
Pegase a signé combien de groupes ?
J-N. L. Une vingtaine au total dont ceux des catalogues existants. Personnellement, mon rôle est celui d’un directeur artistique, éventuellement Chef de projet sur des coups de cœur dont Last Train bien sûr ! Mais, il faut bien distinguer Last Train où on gère tout de façon autonome et les groupes qui signent avec Pegase. Ce sont généralement des entités qui ont ce don de créer sur disque et sur scène, mais qui n’ont pas forcément une stratégie bien précise de leur projet. On est là pour les accompagner. Avec Last Train, c’est nous qui choisissons les partenaires, les co prod, les co-éditions, bref qui décidons. Et d’ailleurs, ce que je conseille au groupe, c’est de ne pas mettre tous leurs œufs dans le même panier. Faire en sorte que le label ne soit pas l’éditeur, que le tourneur, etc. J’ai constaté que quand une même entité représentait un groupe, ça pouvait mal finir.
Comment arrives-tu à concilier toutes ces casquettes ?
J-N. L. C’est évident qu’il faut être organisé… Ensuite, j’ai 24 ans, pas de copines, pas d’enfants, ça simplifie pas mal de chose. En revanche, la partie créative ne s’anticipe pas facilement ! Dans la Too Do List de la journée, il y a rarement « Ecrire un morceau » ! Mais je trouve que l’un sert l’autre. Personnellement, ça m’a permis de gérer les hauts et les bas de la vie, et de pouvoir les retranscrire en chansons ensuite. Je ne suis pas sûr qu’enfermé dans mon local de répétition à simplement faire de la musique, j’aurais sorti ce deuxième album tel qu’il est. Il a quelque chose de spontané et de mélancolique qui vient aussi de cette double casquette.
Comment s’inscrit votre festival lyonnais dans cet emploi du temps chargé ?
J-N. L. On est vraiment très content (la première édition du festival a eu lieu les 19, 20 et 21 septembre; ndlr). On est diffuseur au niveau national et international. On fait tourner des groupes en Europe, en Asie… Et on s’est rendu compte qu’on n’avait aucune action locale ! On a fait l’effort de rencontrer tous les acteurs possibles et imaginables du live à Lyon : promoteurs, organisateurs de festivals, etc. Au départ notre idée était simplement de produire des concerts. Ces concerts sont devenus ce qu’on appelé des « Messes ». L’idée était d’avoir une fois par mois des groupes qui jouent sans ordinateurs, sans filets, juste jouer en live. Avec l’idée de performance, qu’elle soit rock ou non. On a voulu rassembler toute cette énergie sur un temps fort : « La Messe de Minuit ». un festival de 3 jours. Notre cahier des charges était simple : une bonne qualité d’écoute, de la bière pas coupée et une programmation « chanmée ». On a fait venir pas mal de groupes dont d’excellents locaux comme Décibelles, Bandit Bandit mais aussi des artistes français d’envergure nationale (Lysistrata, The Psychotic Monks…) et internationale (Yak, Night Beats ou encore Fat White Family qui venait pour la première fois à Lyon). Et puis il y avait aussi cette fameuse histoire de la parité. Français / Anglais, Homme / Femme… Dans la moitié des groupes, les femmes chantaient. Trop heureux. Ça s’est fait naturellement. On a construit notre programmation comme ça, On a fait deux « complets » sur 3 (jeudi, 750 places et vendredi, 250 places) et on a presque rempli le Transbordeur (1250 sur 1800 places possibles). On était content d’avoir vu ces sourires et cette bienveillance autour des guitares.
Et demain, vous prenez l’avion pour la Corée ?
J-N. L. J’y vais comme gérant de Cold Fame. Comme tourneur et producteur, je suis régulièrement invité sur des festivals pro dans le monde entier. Soit pour découvrir de nouveaux artistes soit pour présenter notre catalogue. En l’espèce, j’ai emmené Holly Two l’année dernière au Zandari Fest de Séoul pour une tournée coréenne et japonaise. Sur place j’ai découvert le groupe de punk psyché DTSQ, Trois accords de guitare ont suffit pour que je prenne une grosse claque. On les a fait venir sur une tournée des gros festivals en France. Ça a bien marché. Fort de ce succès, je suis de nouveau invité cette année. Avec Last Train on a aussi joué en Corée dans un festival. Du coup le disque sort là-bas avec de la promo.
Votre dernier album sort dans le monde entier ?
J-N. L. Oui, avec différentes ambitions. Elles sont importantes quand il existe un label licencié dans le pays avec des plans promo et market associés. Généralement ça passe par un agent. On essaye de ne pas faire n’importe quoi. Aux Etats-Unis, le disque est disponible, mais ce n’est pas encore notre priorité. Après la France où on a été omniprésent ces 3 dernières années, on va aller dans des pays où on a des histoires à écrire, des chapitres à rédiger. On adore l’Asie. On va défendre l’album au Japon, en Chine, en Corée. On va aussi se concentrer sur l’Allemagne. A chaque fois qu’on va jouer de l’autre côté du Rhin, c’est la fête du slip. D’autres pays sont de véritables plaques tournantes comme les Pays Bas ou l’Angleterre. Bref, l’idée, c’est de se concentrer sur l’Europe et l’Asie.
Pourquoi partir en Norvège pour enregistrer votre second album ?
J-N. L. On travaille avec le même réalisateur depuis qu’on est ado, Rémi XXX. Il a monté son studio en Alsace qui est vraiment super. Mais on a appris du premier album que pour enregistrer dans les conditions du live, il fallait une salle de prise de sons conséquente. Et donc qu’il fallait bouger. De son côté, il avait aussi son propre cahier des charges. Il nous a proposé plusieurs studios. La plupart était en ville : nous on avait envie de campagne pour prendre notre temps, s’isoler. Et en Norvège le studio est entouré par la mer. C’est juste magnifique. Je pense que ça a apporté aux couleurs de l’album.
Il existe une grande différence entre les deux albums ?
J-N. L. Déjà, on a grandi. Le premier album a été écrit par des gamins de 17 ans et 21 ans. A l’époque on parlait d’un arrêt sur images. Et puis entre temps, on a tourné 4 ans non stop. Une période importante qui a construit les hommes que nous sommes devenus. Et on a vécu ces hauts et ces bas tous les 4 ensemble. On est sorti de là avec des choses à raconter. Ça fait de ce second album, un opus davantage introspectif, plus personnel… Plus mélancolique aussi, car on a souvent tendance à coucher les choses qui font du mal. C’est important comme musicien, d’être en accord avec la musique que tu joues. Sur le premier disque, certaines compositions ne nous correspondaient plus. Et certains clichés du rock avaient fini par nous lasser. Le rock, c’est génial, mais il traîne quand même un paquet de merde derrière lui. On avait envie de faire une musique un peu plus élégante.
Comment a été écrit l’album ?
J-N. L. Quelque 80% des morceaux ont été écrits au piano. Il y a eu un vrai travail de transposition. Côté son, pas grand-chose de nouveau : on a enregistré avec le matos qu’on utilise depuis toujours. Même emplis, même guitares, même pédales. Simplement, c’est le réal qui prend du niveau et c’est nous qui apprenons à mieux jouer ensemble. L’alchimie est évidente entre nous. Je ne pourrais jamais faire du rock avec d’autres personnes, du moins pas de cette manière là.
Quels sont tes influences ?
J-N. L. Je passe mon temps à écouter des musiques de films, du néo classique, de la pop élégante genre Balthazar. Notre moyen d’expression reste radicalement rock, mais dans le propos, on avait envie d’être plus juste avec ce qu’on écoute, ce qu’on est, ce qu’on aime.
Et demain ?
J-N. L. On va tourner pendant deux ans sûrement. On a toujours été sur la route et la scène nous manque. Pendant un an et demi on nous a enlevé les clés du camion et on s’est retrouvé comme des cons. Revenir au Live nous fait du bien.
Propos recueillis par Hervé Devallan
« The Big Picture » déjà dans les bacs
A voir sur scène
10.10 – LILLE / L’Aeronef
11.10 – SANNOIS / L’EMB
12.10 – RIS ORANGIS / Le Plan
15.10 – RENNES / L’Etage
16.10 – NANTES / Le Stereolux
17.10 – ORLÉANS / L’Astrolabe
18.10 – ROUEN / Le 106
19.10 – REIMS / La Cartonnerie
23.10 – MONTPELLIER / Le Rockstore
24.10 – BORDEAUX / Le Krakatoa
26.10 – TOULOUSE / Le Bikini
31.10 – ANGERS / Le Chabada
01.11 – LA ROCHELLE / La Sirène
02.11 – ALENÇON / La Luciole
06.11 – PARIS / Le Trianon
07.11 – GRENOBLE / La Belle Electrique
08.11 – DIJON / La Vapeur
09.11 – LE MANS / Bebop Festival
13.11 – LONDON / Electrowerkz 🇬🇧
14.11 – ITTRE / Zik Zak 🇧🇪
15.11 – EINDHOVEN / Altstadt 🇳🇱
16.11 – ESCH SUR ALZETTE / Sonic Visions 🇱🇺
12.12 – NANCY / L’Autre Canal
13.12 – AUDINCOURT / Le Moloco
14.12 – ANNECY / Le Brise Glace
19.12 – BRUXELLES / La Rotonde 🇧🇪
20.12 – STRASBOURG / La Laiterie