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The Distance : « Chanter en français, c’est bien quand tu peux sortir des textes à la Bertrand Cantat »
The Distance présente son deuxième album. Un rendez-vous important que les parisiens préparent avec un enthousiasme exigeant et volontaire. Cette fois, ils ont su s’entourer de professionnels tout en ayant une exacte idée du chemin artistique qu’ils veulent emprunter. Interview quelques heures avant leur concert à La Boule Noire, un jeudi 31 mars pluvieux, mais heureux.
Tout d’abord, pourriez-vous présenter le groupe ?
Mike : Bien sûr ! Sylvain est à la guitare, Duff à la basse, Dagulard à la batterie et moi-même, Mike, je suis chanteur guitariste.
Comment a débuté l’aventure The Distances ?
Mike : En 2007 avec Sylvain et moi.
Sylvain : On avait déjà un groupe, Gazoline, un peu plus punk. Rien à voir avec le groupe de Fred Chichin et Alain Kan (rire). Une pure coïncidence. Ceci dit comme on aimait bien Fred Chichin, un mec cool et doué, on a gardé le nom… Jusqu’en 2007 où on a créé The Distance.
Mike : L’équipe actuelle s’est stabilisée avec l’arrivée de Duff en 2009 et de Dagulard il y a 3 ans. Du coup Dagulard ne joue pas sur notre premier album sorti en avril 2012.
Vous venez tous de Paris ?
Mike : Paris et sa banlieue. On est francilien. Moi je suis du coin (l’interview a eu lieu dans un bar entre Anvers et Pigalle) J’habite du côté de Montmartre. Les autres sont de banlieue.
Sylvain : Oui, mais quand on sort, on se retrouve à Bastille ou à Pigalle.
Dagulard : Quand on vient de banlieue et qu’on veut s’encanailler, c’est à Paris que ça se passe.
Quatre ans se sont écoulés entre les deux albums. Vous avez pris votre temps ?
Mike : En fait, on n’a pas voulu précipiter les choses. On a pas mal tourné, y compris en Angleterre, puis on a fait les premières parties de Life of Igony. Et c’est seulement après l’Olympia qu’on s’est mis à composer. Au total on a maquetté une vingtaine de morceaux pour n’en retenir que douze qu’on a enregistré.
Sylvain : Et puis on a pris le temps de trouver un label qui serait intéressé par notre l’album. Oui, tout ça a pris un peu moins de 4 ans.
Dagulard : Quatre ans qui peuvent se diviser en deux ans de concerts et deux ans pour le nouvel album, y compris trouver les nouveaux deals.
Sylvain : On a voulu enregistrer nous même l’album, ce qui commence par sélectionner le matériel, les amplis, les guitares…
Côté production, vous auriez voulu faire appel à quelqu’un ?
Mike : Non. C’est un choix financier aussi bien qu’artistique. On avait une idée très précise du son qu’on voulait. Du coup faire appel à quelqu’un d’extérieur perd de son intérêt, sauf à trouver un ricain ou un anglais. Et là, on retrouve le problème du budget. Pour ma part, j’ai travaillé dans un studio d’enregistrement pendant 3 ou 4 ans il y a une dizaine d’année de cela. Duff également a fait pas mal de son. On s’est dit qu’on pouvait le faire. Mais comme tout le monde, on a regardé des Tutos Youtube pour nous remettre dans le bain (rires). Ceci dit, on avait déjà enregistré nos maquettes.
Entre vouloir et pouvoir, il y a parfois un monde !
Mike : Bien sûr ! C’était aussi un challenge que de vouloir le faire nous même. Le peu d’argent qu’on avait on l’a mis dans la location du matos. Résultat : on dormait sur place, au local, sur des matelas gonflable, dans le froid. On a enregistré en hiver !
Duff : On dormait deux ou trois heures et on enregistrait…
Pendant combien de temps ?
Mike : On a enregistré en plusieurs fois. La première en décembre 2013.
Sylvain : Au total, il y a eu trois séances qui cumulées représentent un bon mois et demi de studio.
Et toujours avec le même matériel ?
Duff : Non, non. Mais quand tu sais exactement le son que tu veux, c’est moins important. Tu le retrouves toujours.
Côté mastering, c’est vous aussi ?
Mike : Le mix, on l’a fait à la maison, tranquillement. Pour le mastering, on avait fait un nous même, mais on n’en était pas satisfait
Sylvain : Pour le coup, on n’avait ni le matos, ni le savoir-faire.
Mike : On est allé chez Francis Caste au fameux Studio Saint-Marthe. On a fait un essai avec lui sur l’EP. On a vu que ça fonctionnait et on a donc enchaîné sur l’album. On s’est bien pris la tête, mais on est hyper content du résultat.
Puisque vous évoquez l’PE : le chanteur de Loading Data vient faire un featuring sur le dernier morceau. Il y a une connexion entre vos deux groupes ?
Mike : Loading Data, on les connaît très bien. Ce sont des copains de bar, de musique, de quartier. Et c’est vrai que ce morceau là demandait à avoir des voix assez graves sur le refrain. Et celui qui a une voix très dark, très « Johnnycashienne », c’est Lo (Suave Chavez, ndlr). Au début, il devait juste chanter sur les refrains et au final, il est sur la totalité du titre.
Vous avez d’autres copains sur la scène française ?
Duff : Oui ! Par exemple dans les groupes qui jouent ce soir à la Cigale (concert du jeudi 31 mars 2016), il y a Junior Rodriguez & The Evil Things. Non seulement c’est le groupe de mon frère, mais on s’entend super bien avec eux. Il y a Dead Sexy aussi,
Mike : Il y a également les mecs de Hell of a Ride, Churchill, Bukowski, etc.
Dagulard : Oui, se sont tous nos potes de bar. On se croise, chacun fait son bout de chemin avant de se retrouver avec nos groupes respectifs. On n’oublie pas qu’on était pote avant. Nos chemins musicaux ne sont pas forcément les même, mais on se retrouve avec plaisir. Tous ces groupes prouvent aussi qu’il y a un véritable renouveau du rock en France.
Au final, si je vous dis que votre dernier album est un mélange de Stoner, de Rock et de Grunge, ça vous convient ?
Mike : C’est exactement ça. On est influencé par la musique de notre adolescence : les années 90. Je me rappelle encore quand « Smell like teen spirits » venait de sortir. Ça a été une claque l’écoute de ce vinyle. On a été bercé avec Nirvana, Depech Mode, Pearl Jam…
Sylvain : Notre point commun, c’est d’aimer tout ce qui sonne bien à nos oreilles. On ne se met pas de barrière. Dans la musique, ce n’est d’ailleurs pas un gage de qualité que de s’interdire quelque chose. Bon, on ne fait pas pour autant du Zouk, même s’il a deux ou trois morceaux qui me font bien tripper ! On défend avant tout la qualité, c’est-à-dire, l’honnêteté et la sincérité dans la démarche artistique.
Et le fait de chanter en anglais, c’est une barrière en France ?
Sylvain : En 2016, ce n’est plus une barrière. On est en Europe, même si elle est malmenée. L’anglais est la langue internationale. On n’a rien contre le fait de chanter en français. C’est une question de musicalité.
Mike : Chanter en français, c’est bien quand tu peux sortir des textes à la Bertrand Cantat. Moi qui ai déjà chanté en français dans d’anciens groupes, c’est compliqué à faire sonner.
Sylvain : Oui, quand c’est fait à la manière d’un Noir Des ou d’un No One is Innocent, c’est mortel ! Après il faut savoir le faire. En toute humilité, nous, on ne sait pas faire ça.
Du coup, l’anglais peut vous ouvrir des portes ?
Duff : On ne veut pas se cantonner à la France. Donc l’anglais est un atout, c’est vrai.
Mike : Pour l’avoir expérimenté, c’est vrai que ça ouvre des portes. Avec Life of Igony, on a joué dans toute l’Europe dans de grosses salles blindées de monde. Chanter en français aurait été un peu plus compliqué. Et puis notre style nécessite de courir les routes et donc de jouer à l’étranger. Montrer que les français sont là et faire comme Gojira dans le Métal.
Duff : Ce qui permet aux étrangers de voir autre chose que le mainstream français. Il n’y a pas que Jacques Brel et Edith Piaf.
Sylvain : On est un bon produit melting pot. On adore le son anglais autant que le son américain. Et puis, en France, il y a des ingés qui savent sortir des sons énormes ! De tout façon, ça peut être tchétchène ou tchécoslovaque, si ça sonne, c’est whaouh.
Et ce soir, il y a les belges de Romano Nervoso !
Sylvain : Quitte à faire un concert devant pas mal de gens, autant en faire profiter nos amis belges ! Ils font la même chose à Bruxelles. Ce soir avec Kursed, Junior Rodriguez & The Evil Things, Daisy Sexy, Romano Nervoso, et nous, on pense que l’affiche est intéressante.
Mike : C’est un concert qu’on serait allés voir.
Les prochains concerts se feront dans le même esprit ?
Sylvain : Oui, pas forcément avec les mêmes groupes, mais avec cette volonté de partage et de découverte. A Lille, samedi 2 avril, on aura Romano Nervoso et The Accident. The Accident, en live, ça décoiffe sa mémère ! Mi Punk, mi Slam, c’est super bien fait, chanté en français, c’est un vrai groupe qui rap, qui slam, qui groove
Dagulard : Ils sont de Paris. C’est le projet du chanteur de Twin Twin. Mais ça n’a rien à voir. Il y a même une petite touche de FFF avec un leader ultra charismatique et très sympathique.
Mike : Pour ce concert de Lille, on a écouté une dizaine de groupes avant de jeter notre dévolu sur The Accident.
Sylvain : C’est une vraie démarche, une conviction. Demain, notre DA nous dit d’arrêter, il y a un clash ! On créé ainsi avec tous ces groupes, un socle artistique et humain sans mercantilisme. Avec un peu de chance, ça peut faire naître un mouvement, voire un festival !
Et vos prochains concerts ?
Sylvain : On va faire pas mal de premières parties comme celle de L’Esprit du Clan, de Dagoba, etc. Et des festivals comme les Garorock, les Francofolies et on jouera pour les 24h du Mans en juin. Les dates tombes au fur et à mesure.
Vous vivez de votre musique ?
Duff : On a tous un boulot alimentaire à côté.
Sylvain : On s’organise un maximum. Ce n’est pas facile.
Mike : On n’a jamais annulé de date pour « raison professionnelle ».
Sylvain : Aujourd’hui, même des artistes de variété ont du mal à vivre de leur musique.
Dagulard : Aux Etats Unis, si tu vis de ta musique c’est que tu tournes. Et c’est cette machine « vente d’album + billetterie » qu’il faut alimenter. Il faut être identifié par les pros et gravir les marches une à une.
Sylvain : Vendre de la musique en 2016, c’est une vraie conviction. Maintenant, tout peut arriver et tu peux exploser du jour au lendemain.
Dagulard : Comme dit Tommy Lee : « Le succès c’est 90% de travaille et 10% de chance ».
L’entourage est indispensable dans cette réussite ?
Sylvain : Oui. C’est d’ailleurs ce qui nous a manqué » pour le premier album. Même si on avait trouvé un petit label, il n’avait malheureusement pas l’assise financière pour franchir un palier. Aujourd’hui, on est avec Hervé Lauzanne et son label Nota Bene. Il a une vraie expérience : 13 ans de DA chez Sony, il s’occupe toujours des productions visuelles d’Indochine, il a participé à un album de Noir Désir de NTM. Il a une vraie expérience et il aime la musique. Il a été musicien. Pour nous, c’est le partenaire parfait. Mais, il a fallu le convaincre ! Dans son monde à lui, on n’existait pas.
Dagulard : Les pros ont toujours une méfiance vis-à-vis du rock alternatif.
Propos recueillis par Hervé Devallan
Page The Distance sur Rock made in France
Chronique de l’EP Mesmerise
3 thoughts on “The Distance : « Chanter en français, c’est bien quand tu peux sortir des textes à la Bertrand Cantat »”
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Hey pourquoi ma tête est en photo ?
Les voies de Facebook sont impénétrables… Et la vidéo apparaît bien dans l’interview de The Distant. Ils ne tarissent pas d’éloge sur The Accident !
Julien Galenski